Ballons et dirigeables dans les Hauts-de-Seine : berceau de l’aéronautique

Le long de l’allée centrale du parc de l’île Saint-Germain  à Issy-les-Moulineaux, du 10 novembre 2022 au 30 juin 2023, le Département propose une exposition doublement en plein air puisque les images, accessibles au gré de la balade, concernent Ballons et dirigeables dans les Hauts de Seine : Berceau de l’aéronautique. Grâce aux fonds d’archives de Boulogne-Billancourt et du Département, du musée de la Carte à jouer à Issy-les-Moulineaux, et du Musée de l’air et de l’Espace du Bourget, nous remontons à pied le cours du temps aérien, des premiers ballons militaires à la fin du XVIIIe siècle aux grands dirigeables et multiples ballons d’observation dans le ciel du début du XXe siècle.

1. Ballons et dirigeables dans les Hauts-de-Seine : berceau de l’aéronautique

Le 31 janvier 1863 sortait le roman de Jules Verne, Cinq semaines en ballon, récit relatant le voyage imaginaire au-dessus de l’Afrique du Dr Fergusson,accompagné de son serviteur Joe et de son ami Dick. Cette histoire romanesque a marqué plusieurs générations. En ce début de XXIe siècle, la véritable histoire des aérostats qui ont incarné les débuts de l’aéronautique, en revanche, ne fait plus guère partie de notre mémoire. Le rêve d’Icare a pourtant pris forme ici, dans l’ouest parisien, grâce aux ballons et aux premiers dirigeables français dans divers lieux. Le territoire correspondant à l’actuel département des Hauts-de-Seine offrait en effet plusieurs avantages : la proximité avec Paris, la présence d’hommes d’affaires pouvant investir et d’ouvriers qualifiés ; le développement d’industrie représentatives de la seconde industrialisation, en particulier la construction automobile ; ou encore de grands espaces qui permettaient d’installer des ateliers de fabrication.

Tout d’abord, ce fut le domaine royal de Meudon qui devint en 1794 un lieu d’essai aéronautique pour l’armée. Ce fut aussi, le champ de manoeuvre d’Issy-les-Moulineaux, l’actuel héliport de Paris, sur lequel se déroulèrent de nombreux essais aéronautiques civils et militaires. Ce fut également les coteaux de Saint-Cloud qui accueillirent le parc du premier club aéronautique au monde ou encore la plaine des Sablons à Neuilly qui vit surgir le hangar à dirigeable du millionnaire Alberto Santos Dumont. Plus loin à l’Ouest, l’industriel Zodiac choisit l’aérodrome de Saint-Cyr. Tandis qu’à Sartrouville, l’industriel d’Astra, Édouard Surcouf, construisit un hangar à dirigeable dans une ballastière pour accueillir les premiers dirigeables fabriqués à Boulogne-Billancourt. Les vols et les mésaventures de ces géants des airs qu’on appelait « les plus légers que l’air » furent très largement photographiés. 

Le Département des Hauts-de-Seine a souhaité faire revivre cette aventure et la présenter aux Altoséquanais grâce à l’aide de plusieurs communes, des photographies issues des autochromes que détient le Musée de l’Air de l’Espace-le Bourget, des Archives départementales et de l’Association pour un Centre Européen des Ballons et Dirigeables (A.C.E.B.D). L’importance du fonds photographique disponible sur ce sujet nous permet de redécouvrir aujourd’hui ces vaisseaux de l’espace aux formes singulières. Les images insolites et spectaculaires qui sont dévoilées, offrent le témoignage aventure humaine, technique et industrielle. Elles ouvrent une fenêtre sur l’aspect des Hauts-de-Seine au tournant des XIXe et XXe siècle : entre scènes bucoliques et paysage industriel.

Commissaire de l’exposition : Elizabeth Juguet
Sources scientifiques :
Source : Albert Caquot 1881-1976 Savant, soldat et bâtisseur, Jean et Thierry Kerisel, 2001

2. La première compagnie militaire d’aérostier au château de Meudon

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Dirigeable Giffard 24 septembre 1852 ©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 8097
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Dupuy-de-Lome, 2 février 1872 ©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 1749

Depuis la fin du XVIIIe siècle,les ballons inventés en 1783 par les frères Montgolfier enchantent le public. Ils sont utilisés lors des fêtes et de diverses manifestations. Après la Révolution, ils trouvent également un usage militaire en tant qu’outil d’observation des lignes ennemies. La première compagnie militaire d’aérostiers est créée à Meudon, en 1794 sur décision de la Convention républicaine. Elle est confiée au chimiste et  aérostier Jean-Marie Joseph Coutelle reconnu pour ses études sur les gaz. Lors de la bataille de Fleurus, le 26 juin 1794,les renseignements obtenus par ses observations permettent à la France de remporter la victoire. 
Une seconde compagnie est créée, accompagnée de la création d’une école d’aérostiers à Meudon dont la direction est confiée à Jacques Nicolas Conté, le futur inventeur du crayon à mine. Néanmoins l’aventure tourne court sous le Directoire, celui-ci considère que les ballons sont trop soumis aux caprices de la météo pour être régulièrement employés et ferme l’école en 1802.

Les premiers dirigeables

Dans le domaine civil, l’aventure aéronautique se poursuit au cours du XIXe siècle, tout d’abord comme moyen de divertissement, notamment lors des fêtes impériales puis autour du sport aéronautique. Les ballons sont également utilisés pour la météorologie et l’étude des nuages ou encore par Nadar pour effectuer les premières photographies aériennes. Mais les ballons sont soumis aux caprices du vent pour leur propulsion et leur navigation. Le désir d’inventer de nouveaux aérostats qui permettent de diriger le vol émerge naturellement.
Il faut attendre 1852, pour qu’un premier vol dirigé et motorisé soit réalisé. On le doit à l’ingénieur Henri Giffard qui crée le premier dirigeable. Il place un moteur à vapeur d’une puissance de 3 ch. sous un ballon fusiforme gonflé au gaz d’éclairage. 
Charles-Henri Dupuy de Lôme, crée un dirigeable en 1872 qui vole le 2 février. Si sa machine présente des améliorations au niveau de la suspension et de l’équilibrage du ballon, elle ne dispose pas de moteur. Elle est propulsée par huit marins actionnant une manivelle qui entraine une hélice. Elle atteint la vitesse de 10 km/heure.

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Vernissage des ballons par la compagnie d’aérostiers au Château de Meudon
© Nicolas-Jacques Conté / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget Inv. 3803

 

3.  Charles Renard et l’Établissement central de l’aérostation militaire de Meudon- Chalais

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Charles Renard et ses officiers 1888  © DR. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace – Le Bourget Inv. 2007/1/354

Le siège de Paris durant la guerre de 1870 a remis au premier plan le rôle stratégique de l’aéronautique dans l’armée, Gambetta ainsi qu’une centaine de personnes ont fui la capitale en ballon.
Charles Renard, né en 1847 et diplômé de Polytechnique, a participé à la guerre dans le corps du génie. Devenu colonel, il convainc l’armée de relancer l’aéronautique miliaire à Chalais, dans l’ancien domaine royal du château de Meudon où fût créée la première compagnie d’aérostiers. Il y fonde en 1877 l’Établissement central de l’aérostation militaire de Chalais-Meudon, dont il est nommé directeur. 

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Charles Renard 1884 © D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace – Le Bourget Inv. 2007/1/346 
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Ballons captifs Sarthe Pilatre et Côte d’Or à Meudon le 30 mai 1896 
© D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget Inv. 2013/1/407

Pour construire ses ballons puis ses dirigeables, il achète l’ancienne galerie annexe de la salle des machines réalisée par l’ingénieur Henri de Dion pour l’exposition universelle de 1878. La structure est surélevée et des galeries annexes lui sont ajoutées. Le bâtiment dénommé hangar Y fut le premier hangar à dirigeable au monde et l’un des derniers encore visibles aujourd’hui ; c’est également l’un des derniers bâtiments industriels des Hauts-de-Seine. Il a été classé monument historique en 2000 et fait l’objet d’une restauration et d’une reconversion grâce à la fondation Art Explora.  

4. Le dirigeable « La France»

Renard et Krebs, La France ,Fonds Renard R 1054, photo prise de l’observatoire de Meudon le 23 septembre 1883 
©Observatoire de Meudon / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 226

Avec Arthur Krebs, Charles Renard fait faire un pas de géant à l’aéronautique française en construisant le dirigeable La France. Muni d’un moteur électrique alimenté par pile, La France réalise en 1884 le premier vol dirigé permettant de revenir à son point de départ, soit une boucle de 8 km au-dessus du bois de Meudon et du plateau de Villacoublay, accomplie en 23 minutes.

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Renard et Krebs, La France ,Fonds Renard R 1054, photo prise de l’observatoire de Meudon le 23 septembre 1883
©Observatoire de Meudon / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 226 

5. Saint-Cloud : Le parc de l’Aéroclub de France

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Ballons libres de la fête aérostatique © Archives départementales des Hauts-de-Seine

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Ernest Archedeacon © Agence photographique Chéri-Rousseau / Coll. musée de l’Air et de l’Espace – Le Bourget Inv. 999/192/18

À la fin du XIXe siècle, le désir de voler gagne les industriels. Ils s’investissent dans l’aventure aéronautique pour en repousser les limites. Le caractère festif fait place au sport aéronautique.

L’Aéroclub de France, le premier au monde, est fondé en 1898 par des passionnés qui sont tous membres de l’Automobile club de France. Les deux cercles partagent les même locaux, place de la Concorde. Parmi les membres fondateurs de l’Aéroclub on trouve des industriels comme Henry Deutsch de la Meurthe, fortune de l’industrie chimique et du pétrole et le millionnaire brésilien Alberto Santos Dumont. Enfin, l’Aéroclub de France n’aurait pas eu le rôle qu’il a tenu sans l’avocat et mécène Ernest Archdeacon. À l’heure des tout premiers vols, ce dernier comprend la nécessité de créer une structure neutre et indépendante chargée d’organiser cette activité et d’homologuer les records aéronautiques.

L’Aéroclub de France organise sa première manifestation  aéronautique en 1898. Elle se situe à Neuilly, au jardin d’acclimatation.

En 1901, l’Aéroclub de France achète des terrains sur les coteaux de Saint-Cloud afin de permettre aux membres du club de voler aux portes de Paris. Grâce à ce site (actuel stade des Coteaux-gradin), les membres bénéficient d’un terrain d’envol dédié, du matériel de gonflage et de hangars pour entreposer les ballons puis les dirigeables. Sur ce terrain, diverses manifestations liées à l’aéronautique sont organisées, notamment des courses et des compétitions.

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Ballons libres de la fête aérostatique © Archives départementales des Hauts-de-Seine

Parmi les industriels membres fondateurs de l’Aéroclub on compte également Léon Serpolet ou le pionnier de l’industrie automobile Jules-Albert de Dion. Les autres membres viennent de l’univers des aérostiers et des explorateurs comme Henry de la Vaulx ou le comte Henri de la Valette.

Henri Deutsh de la Meurthe organise des compétions grâce au club, avec une arrière-pensée : l’idée que l’aéronautique puisse devenir un moyen de locomotion. On verra son rôle dans le développement de l’aéronautique civile avec la société Astra.

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Ballons libres de la fête aérostatique © Archives départementales des Hauts-de-Seine

6. La place des femmes dans les débuts de l’aéronautique

La présence des femmes à bord des ballons fait polémique dès les débuts de l’aérostation. En 1798, sous le Directoire, l’aéronaute André-Jacques Garnerin forme le projet d’embarquer la célèbre comédienne de l’époque, Célestine Henry. Il rencontre l’opposition de l’Académie des sciences qui lui oppose que les organes féminins ne sont pas assez solides pour supporter l’ascension. Les mêmes autorités réprouvent les vols mixtes au nom de la moralité. Toutefois l’administration départementale, nouvellement créée par la Révolution, accorde son autorisation à monsieur Garnerin et mademoiselle Henry. Les vols avec passagères vont se multiplier et les femmes vont elles-mêmes devenir aéronautes. Ces premières pilotes de ballon sont le plus souvent des professionnelles, épouses ou filles d’aérostiers. Issues de milieux modestes, elles sont amenées à remplacer leur époux lors des manifestations, lorsque celui-ci est décédé. Madame Blanchard devient ainsi la première pilote professionnelle de ballon. Elle intervient lors de manifestations et devient l’Aérostier   des Fêtes du Gouvernement durant le Premier Empire après le décès d‘ A.J Garnerin qui occupait préalablement cette fonction.

À la fin du XIXe siècle, sous la IIIe République, l’aéronautique souhaite se démarquer de cette image festive et préfère celle des activités sportives et techniques, domaines dévolus aux hommes. Dans ses débuts, l’Aéroclub de France est fidèle à cette idée. Les femmes ne sont admises que comme passagères, mais elles veulent également obtenir leur brevet de pilote et voler.

7. L’association Stella : les femmes aussi veulent être pilote

nullMademoiselle Tissot , ballon libre la Touraine, fête de la Stella 16 juin 1911 ©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget Inv. 2013/1/187null
Marie Surcouf, Présidente de la Stella
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace – Le Bourget Inv. 2007/1/736
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Mademoiselle Tissot , ballon libre la Touraine,
fête de la Stella 16 juin 1911 ©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace – Le Bourget Inv. 2013/1/42

L’ACF crée une section féminine en 1906, le comité des dames, réservée aux proches des membres masculins du club. Marie Surcouf, en devient présidente. Elle est l’épouse d’Edouard Surcouf, industriel et aérostier qui a créé ses propres ateliers aéronautiques à Boulogne.

Marie Surcouf Bayard, est un personnage clé de l’aéronautisme au féminin. Elle obtient en juillet 1906 son brevet de pilote. En 1907, le comité des dames du club compte 55 adhérentes. Mais en 1908, un différend oppose le comité des dames à la Direction de l’ACF. Marie Surcouf démissionne et fonde en février 1909 l’association d’aéronautes féminines La Stella. 
Cette association féministe organise des fêtes, manifestations et compétitions dont les pilotes sont des femmes. Madame Blériot en fait partie. Des personnalités de la haute société parisienne rejoignent l’association comme la princesse de Polignac.

À la veille de la grande guerre, l’association compte 350 membres dont une majorité de femmes, les hommes sont membres non dirigeants. 
Durant le conflit les activités aéronautiques sont arrêtées et l’association réoriente son activité vers les oeuvres de bienfaisance.

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Marie Surcouf, Présidente de la Stella ©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace – Le Bourget Inv. 2007/1/736 

8. Alberto Santos Dumont : quand l’aéronautique devient une activité mondaine et spectaculaire

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Le Brazil au Jardin d’acclimatation à Neuilly, 1898  ©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 9323

Alberto Santos Dumont est une personnalité hors normes dans l’histoire de l’aéronautique française. Dandy passionné, il consacra sa fortune personnelle au sport aéronautique. Défier l’apesanteur lui valut des chutes spectaculaires mais aussi une célébrité dont témoignent les photos présentées ici. En 1898, il fait fabriquer un premier ballon, dénommé L’Amérique et participe à une course. Son vol le mène jusqu’en Creuse. La même année, les ateliers Lachambre, situés à Vaugirard, lui fabriquent un ballon qu’il souhaite le plus petit possible, Le Brazil. Il le teste pour un premier vol dans le Jardin d’Acclimatation, à Neuilly. C’est le début d’un succès médiatique qui accompagnera son aventure et toutes ses inventions.

Alberto Santos Dumont prend conscience de la nécessité de pouvoir diriger son vol. À l’automne 1898 il construit son premier dirigeable, le numéro 1 dont il fait la démonstration en septembre au Jardin d’Acclimatation. Le ballon fusiforme est très allongé. Alberto Santos Dumont a réalisé lui-même le moteur en superposant sur un même carter deux moteurs De Dion destinés aux tricycles. Le dirigeable parvient à s’élever à 400 mètres de haut, mais chute au bout d’un quart d’heure. Alberto Santos Dumont poursuit la création de nouvelles machines. Le numéro 2 et le numéro 3 sont des dirigeables expérimentaux. Pour limiter les chutes il invente les essais au sol.

null©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 39619null©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 39576
nullSantos-Dumont , le N°1
Neuilly 20 septembre 1898
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace – Le Bourget
Inv. 2013/1/42

9. Alberto Santos Dumont : en route vers la victoire

Le concours
Le 24 mars 1900 Henri Deutsch de la Meurthe lance un défi aux aérostiers, il est prêt à offrir cent mille francs à celui qui parviendra à contourner la tour Eiffel en partant du parc de l’aéroclub en moins d‘une demi-heure. Alberto Santos Dumont souhaite relever le défi avec son numéro 4. Ce sera un échec. 

Le numéro 5 marque une étape importante. Le 12 juillet 1901 Santos Dumont parvient à réaliser un vol de quatre heures et d’une distance de 45 km. Après avoir survolé plusieurs fois l’hippodrome de Longchamp, il s’élance vers Paris mais il est contraint de se poser au Trocadéro pour réparer une avarie, puis il contourne la tour Eiffel avant de regagner Saint-Cloud. Les essais se multiplient jusqu’au 8 août. Ce jour-là l’hélice se bloque sur le chemin du retour. Le ballon se dégonfle et chute dans la cour d’un hôtel quai de Passy. 

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Santos-Dumont, le N° 5 au-dessus de l’hippodrome de Longchamp le 12 juillet 1901
©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 24947

Alberto Santos Dumont, le numéro 6 vainqueur du Prix Deutsch de la Meurthe
C’est avec le numéro 6 qu’Alberto Santos Dumont remporte enfin le prix Deusche de la Meurthe. Le dirigeablea pour modification principale la forme de son gouvernail. Le 19 octobre, il réalise l’exploit. Parti à 14h12 de Saint-Cloud, il double la tour Eiffel dix minutes plus tard. Au retour, il atteint Saint-Cloud à 15h11. L’aéronef se pose plus loin à 15h12 du fait d’un chantier sur le terrain. Dans un premier temps, le record lui est contesté par certains membres du jury. Il obtient justice et se voit décerné le prix Deutsch de la Meurthe le 4 novembre 1901.

Il quitte aussitôt l’Aéroclub de France et part d’abord pour Monaco pour réaliser des vols au-dessus de la mer puis pour Londres où l’aéronef est présenté au Cristal Palace en 1902. C’est là qu’il achève son destin, détruit par un maniaque qui y met le feu. Fort de son succès Alberto Santos Dumont commence une carrière internationale, notamment aux États-Unis.

nullSantos-Dumont, le N°4. Essais au sol à Saint-Cloud automne 1900 ©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 39613null
Santos-Dumont, le N°5 contourne la Tour Eiffel, le 12 juillet 1901 ©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 39611
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Santos-Dumont, le N°6 contourne la Tour Eiffel pour le grand prix de l’aéroclub, 29 octobre 1901 ©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 39607

10. Alberto Santos Dumont : la Baladeuse ou le numéro 9

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Le N°9 sur l’avenue de Longchamp, Neuilly 1903 ©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget Inv. 2015/1/392

Alberto Santos Dumont ayant quitté l’Aéroclub de France, construit son propre hangar à Neuilly dans l’un des terrains issus du lotissement du parc de la Folie Saint-James, non loin de Bagatelle. Le numéro 9, qu’il surnomme La Baladeuse est un des aéronefs les plus marquant de sa carrière aérienne. Il réussit avec cet appareil à réaliser une machine particulièrement maniable, plus compacte et plus économique. Alberto Santos Dumont est si sûr de sa machine qu’il multiplie les expériences et les invitations auprès du public. Il embarque sur son dirigeable un jeune garçon de sept ans, le 28 juin 1903. Le 29, il laisse une jeune cubaine guideroper seule La Baladeuse depuis Neuilly jusqu’au terrain de polo de Bagatelle.

Alberto Santos Dumont est devenu une célébrité. Il participe avec sa machine aux fêtes officielles du 14 juillet. Il survole la revue des troupes par le président Loubet qui se tient à Longchamp. Santos-Dumont salue le président de vingt et un coups de feu qu’il tire avec un revolver.

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La Baladeuse survole l’hippodrome de Longchamp, le 14 juillet 1909 ©RAFFAELE / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget Inv. 2015/1/394

11. Alberto Santos Dumont : du dirigeable à l’avion

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Santos Dumont, le N° 19 bis, la libellule et la demoiselle , Neuilly Saint James, 11 novembre 1908 ©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 1118

Le numéro 14 est le dernier dirigeable d’Alberto Santos Dumont, avant qu’il ne se tourne vers la construction d’aéroplanes. Dans ce domaine, il atteint son point d’aboutissement avec La Libellule, numéro 19 de ses engins volants, puis la fameuse Demoiselle construite en 1909, exposée au premier salon de la Locomotion aérienne à l’automne 1909 sur le stand Clément Bayard. Alberto Santos Dumont n’a jamais été un industriel. Chacune des machines était un prototype qui s’inscrivait dans son aventure personnelle vers la conquête pacifique du ciel. Il a toutefois vendu la licence de La Demoiselle à l’industriel Adolphe Clément Bayard qui l’a produite en 22 exemplaires. En 1910 après un dernier vol sur La Demoiselle qui se termine par un grave accident, il décide de se retirer de l’aéronautique et vend son atelier.

Le déclenchement de la Grande Guerre l’affecte profondément. Esprit visionnaire, aventurier mais profondément idéaliste, il refuse l’utilisation de l’aviation comme arme de guerre. Il écrit à la Société des Nations lors de la première conférence sur le désarmement afin de dénoncer cette évolution. Retourné au Brésil où il est accueilli en héros, il se suicide en 1932 après avoir assisté à la répression armée par le gouvernement de la Révolution constitutionnaliste, lors de laquelle l’aviation est employée pour bombarder la population.

12. Les ateliers Édouard Surcouf

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Le dirigeable République au-dessus de Saint-Cloud © Archives départementales des Hauts-de-Seine 
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Edouard Surcouf 
©Photographie Moderne / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 26884

Né e en novembre 1862, Édouard Surcouf se passionne très jeune pour l’aéronautique. Il entre comme apprenti à l’Académie de l’aérostation météorologique dès l’âge de 15 ans. Il effectue son premier vol à l’âge de 17 ans. Après avoir travaillé pour les frères Tissandier, il intègre en 1886 les grands ateliers du Champs de Mars qui, en cette fin du XIXe siècle, constituent la plus grande fabrique française de ballons. Surcouf devient directeur général de l’entreprise en 1894. Il transfère à Boulogne l’entreprise qu’il a reprise à son compte en 1899, sous le nom d’Ateliers aéronautiques Édouard Surcouf. Elle est située au 121-123 rue de Bellevue. Il épouse en 1897, Marie Bayard qui deviendra une figure de l’aéronautique féminine.

En 1902 Surcouf construit l’enveloppe de son premier dirigeable pour la société Lebaudy frères. Les frères Lebaudy détiennent la première entreprise sucrière française et se lancent dans l’aventure aéronautique. Comme l’ensemble des enveloppes de dirigeables que Surcouf a construit, il s’agit d’une enveloppe souple. L’aéronef présente la caractéristique d’avoir un entoilage constitué de deux couches de coton enduites de caoutchouc vulcanisé fourni par Continental. 
Les frères Lebaudy construisent leurs propres dirigeables destinés essentiellement à l’armée. Parmi ces vaisseaux figure l’aéronef la République, photographié ici dans les Hauts-de-Seine.

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© Archives de la ville de Boulogne - République, photographié ici dans les Hauts-de-Seine

13. La Société Astra  de Construction Aéronautique

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Henry Deutsch de la Meurthe ©Prieur-Branger /Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget Inv. 2002/2/269

Le principal client des ateliers Surcouf reste toutefois Henry Deutsch de la Meurthe, fortune industrielle qui leur commande en 1904, le dirigeable Ville de Paris. Après un accident lors du vol inaugural, il est reconstruit et s’envole avec succès en 1906. Il mesure 62 m de long, est équipé d’un moteur de 70 ch et d’une hélice Renard de 6 m de diamètre. Il est doté d’un empennage arrière cruciforme constitué de ballonnets d’équilibrage, caractéristique des premiers dirigeables d’Astra et qui assure sa stabilité de l’aerostat. C’est dans le hangar construit à Sartrouville dans une ballastière qu’il est stationné.

Le sable utilisé comme ballaste est relâché par les dirigeables au moment de leur ascension.

En 1907, après la perte du Lebaudy Patrie, Henry Deutsch de la Meurthe met à disposition de l’armée le Ville de Paris qui vole à une vitesse moyenne de 36,6 km/h. À partir de 1908 Henry Deutsch de la Meurthe rachète les ateliers Surcouf qui intègrent la Société Astra de Construction Aéronautique. Cette dernière produit également des avions grâce à l’achat des brevets Wright pour la France. Surcouf est désormais directeur technique de la branche dirigeable.

Astra, les dirigeables touristiques et la Compagnie Générale Transaérienne

Henry Deutsch de la Meurthe commande aux ateliers un dirigeable en vue d’une exploitation touristique : Le Ville de Bordeaux, en 1908. Mais il ne parvient pas à le vendre. Il a alors l’idée de l’utiliser pour créer une ligne de transport voyageur entre Paris et Nancy. La ligne doit être lancée pour l’Exposition Internationale de l’Est qui se déroule en mai 1909. Le dirigeable, rebaptisé Ville de Nancy, réparé et modifié n’est prêt qu’en juillet 1909. Il gagne la Lorraine et réalise ses premiers vols commerciaux au-dessus de la région. 

Henry Deutsch de la Meurthe crée en octobre une compagnie de transport aérien, la Compagnie Générale Transaérienne. Première compagnie de transport aérien française, rachetée plus tard par les Messageries aériennes, elle est l’ancêtre d’Air France.

Astra Ville de Paris, Grand Palais, décembre 1908
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 9747bis

14 . L’Astra Clément Bayard

Sur la période 1908-1913, Astra produit de nombreux dirigeables, que ce soit pour le compte d’autres industriels, pour des gouvernements étrangers et surtout pour l’armée française. En 1908 Astra construit pour Clément Bayard, fortune de l’industrie du cycle et de l’automobile, un dirigeable. Il s’agit d’un rapprochement entre deux industriels alto-séquanais. Clément Bayard équipe en moteur les dirigeables d’Astra, Ville de Nancy, Ville de Pau et Ville de Lucerne avec des moteurs de 115 chevaux permettant d’atteindre 50 km/heure. L’industriel se lancera ensuite dans la fabrication de dirigeables souples à son propre compte. Au cours de son premier vol, le dirigeable survole Saint-Germain-en-Laye, Maisons-Laffitte puis Paris. Il est acheté par la Russie. Lors de son dernier vol d’essai, alors qu’il a réussi à monter à plus de 1500 mètres d’altitude, il s’accroche dans les arbres de l’Ile de la Commune située sur la Seine et s’abime dans le fleuve où il est récupéré.

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Panorama sur la Seine avec l'Astra Clément Bayard © Archives départementales des Hauts-de-Seine

15. Le Colonel-Renard et l’Astra XIII

Ces deux  commandes pour l’armée attestent des évolutions techniques dans la conception des dirigeables. Le Colonel-Renard, assemblé à Beauval, est vainqueur du prix des Aeronats de la semaine de Champagne en 1909. Il dispose encore de ballonnets d’équilibrage latéraux arrières et d’un ballonnet intérieur qui régule la pression lors des variations d’altitude. La société Astra fait construire un hangar sur le champ de manoeuvre d’Issy-les-Moulineaux fin 1909, à côté de celui de Clément-Bayard. Derrière les deux hangars, une usine à gaz chargée de produire de l’hydrogène est érigée. 

Après L’España commandé par l’Espagne pour la campagne du Maroc en 1909 Astra construit pour la Russie l’Astra XIII en 1913.

16. Du Ville-de-Bruxelles en 1909 à l’Astra Torres en 1911

Pour ménager les craintes de la Belgique concernant le risque imminent d’une guerre francoallemande entrainant l’invasion de leur pays et pour les rallier à la France, le gouvernement français invita les souverains belges pour le défilé du 14 juillet 1909. Le Ville de Bruxelles, à gauche, est présentés aux souverains. Il est le dernier dirigeable à disposer de ballonnets de stabilisation à l’arrière.

Astra embauche un ingénieur espagnol, Leonardo Torres Quevedo, qui développe pour la firme de nouveaux modèles d’aéronefs militaires : les Astra-Torres type Vedette. Ils sont dotés d’une enveloppe trilobée plus résistante à la pression et aux déformations. La longueur de ce dirigeable n’est que de 47,72 mètres et le volume de 1590 m3. En effet l’armée se fournit en dirigeables de différentes catégories, les vedettes d’une taille d’environ 3000 m3, les éclaireurs d’environ 6000 m3 et les croiseurs d’environ 9000 m3.

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Astra Ville de Bruxelles, Issy-les-Moulineaux en juillet 1909 ©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 4652
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Astra Torres, Issy-les-Moulineaux 1911 ©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 6121

16. La construction d’un dirigeable : les principes

Principe d’Archimède
Tout corps immergé dans un fluide subit une force
opposée au poids du fluide déplacé.
On nomme cette force « portance aérostatique » :
avec :→       →
          F  =  p.g.V
F :  valeur de la portance dirigée vers le haut
p :   masse volumique de l’air déplacé par le ballon
g :  volume d’air déplacé par le ballon
V : accélération due à la gravité (dirigée vers le bas)

Les dirigeables français construits à cette époque ont la particularité d’être des dirigeables à enveloppe souple à la différence des dirigeables allemands dotés de structure métallique. Seul le Spiess construit par la firme Zodiac entre 1912 et 1913 est un dirigeable rigide.

« La principale caractéristique des ballons dirigeables est que leur sustentation est principalement due à la poussée d’Archimède (voir schéma) cela a directement une conséquence bénéfique sur leurs besoins énergétiques, qui sont essentiellement requis pour leurs déplacements et non pour leur maintien en vol. De nos jours plus aucun ballon dirigeable n’est gonflé à l’hydrogène pour des raisons évidentes de sécurité, et la grande majorité utilise de l’hélium. Notons cependant que l’expression “plus léger que l’air” est impropre : la densité de tout ballon dirigeable doit toujours être légèrement supérieure à celle de  l’atmosphère où il évolue, sans quoi il devient quasiment incontrôlable. Le supplément de portance nécessaire à leur maintien en vol est obtenu soit grâce à des effets aérodynamiques provoqués par une vitesse de déplacement et une inclinaison de l’enveloppe ou de surfaces de contrôle, soit grâce à des actionneurs qui propulsent de l’air vers le bas. Le maintien d’une densité constante par rapport à l’atmosphère où le ballon évolue doit lui aussi être contrôlé, pour pallier les variations de température et de pression de l’atmosphère, mais aussi la variation de masse du ballon due à la consommation de carburant : cela est le plus souvent réalisé grâce à des “ballonnets», petites enveloppes localisées à l’intérieur de l’enveloppe principale, remplies d’air et dont la pression est contrôlée. Le contrôle de la pression des ballonnets modifie aussi leur volume, assurant ainsi indirectement un contrôle de la pression de gaz porteur, ce qui permet de maintenir la forme des enveloppes souples. Pour les ballons les plus sophistiqués, les ballonnets sont aussi utilisés pour contrôler l’équilibrage. »
Extrait de Ballons dirigeables autonomes de Simon Lacroix LAAS/CNRS

18. La construction d’un dirigeable : les principes

null© Archives de la ville de Boulognenull
© Archives de la ville de Boulogne

 

Les dirigeables du début du XXe siècle sont constitués de différentes parties : l’enveloppe de forme allongée, les ballonnets d’équilibrage intérieurs ou extérieurs, la nacelle qui suit la forme allongée de l’aérostat sans lui être attachée directement, l’accastillage, les hélices, l’arbre de transmission, les moteurs, enfin les ventilateurs qui alimentaient les ballons intérieurs. Sur certains modèles un empennage arrière est ajouté à la nacelle.

Les enveloppes sont réalisées initialement en coton ou en soie pongée du Japon pour plus de légèreté. Les pièces de tissu sont assemblées à la machine à coudre dans les ateliers Lachambre à Vaugirard, dans les ateliers Surcouf à Boulogne et chez Maurice Mallet à Puteaux (future entreprise Zodiac). Jusqu’à l’apparition des enveloppes en caoutchouc, elles sont enduites d’un vernis, malheureusement toxique pour ceux qui le manipulent : les vernisseurs et vernisseuses. Les enveloppes sont gonflées au gaz de ville ou à l’hydrogène. Le temps de gonflage était très long, plusieurs jours pour les ballons, plusieurs semaines pour les dirigeables.

L’aérostation emprunte à la marine son vocabulaire pour la navigation et aussi une partie de son matériel comme les ancres pour l’atterrissage et le maintien au sol des ballons. Sur les dirigeables d’Alberto Santos Dumont, elles sont remplacées par le guiderope, long câble qui leste l’aérostat en touchant le sol et permet de le guider à la main. Les grands dirigeables sont équipés d’un système de câbles et de cordes, les élingues, qui reliant la nacelle à l’enveloppe et permettent aux hommes de guider l’aérostat lors des manoeuvres au sol toujours délicates.

Les premiers dirigeables connaissent des progrès de taille et de vitesse au fur et à mesure que les moteurs gagnent en puissance. Les premiers moteurs de De Dion et Clément Bayard qu’emploie Alberto Santos  Dumont ne font que quelques chevaux alors que le Lebaudy 1, construit en 1902, fait déjà 40 chevaux comme son homologue Clément Bayard. Les Lebaudy montent à 120 chevaux suivis des Astra Torres qui affichent une puissance moteur de 150 chevaux. Le record de puissance moteur de ces machines est atteint par Zodiac avec 200 chevaux pour le Spiess.

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© Archives de la ville de Boulogne

19. Clément-Bayard

Adolphe Clément est un entrepreneur alto-séquanais qui fait fortune grâce à la fabrication de cycles. Il s’enrichit surtout par l’exploitation de la licence des pneumatiques Dunlop pour la France. Il construit son usine sur les quais de Seine à Levallois-Perret, d’abord pour les vélos et les pneus, puis pour la construction d’automobiles à partir de 1896, grâce à son association avec le constructeur Gladiator. En 1906, il obtient l’autorisation de transformer son nom en Clément-Bayard.

En 1908, il décide de se lancer dans l’aventure aéronautique. Après la construction de son premier dirigeable par la société Astra, il obtient l’autorisation de l’armée de construire un hangar à dirigeables sur le champ de manoeuvre d’Issy-les Moulineaux, en 1909 à côté de celui d’Astra. L’entreprise construit six dirigeables souples entre 1910 et 1913 dans l’Oise, à Lamotte Breuil. Ils viennent à Issy-les-Moulineaux en démonstration et essais pour l’armée, principal client auquel ils sont destinés.

Le Clément-Bayard N°2 fait 76,5 mètres de long pour un volume de 7000 m3, il est équipé de deux moteurs de 120 chevaux. Durant les grandes manoeuvres, Le Clément-Bayard N°2 doit établir la liaison entre l’armée du Nord et celle de Paris, il parcourt 120 km en deux heures et gagne Paris depuis Briot (Oise). Il est envoyé à Issy-les-Moulineaux pour effectuer la liaison TSF avec la Tour Eiffel, mission accomplie avec succès. Lors de sa trente-troisième ascension, il rejoint Londres depuis Briot qu’il atteint en six heures.

Manoeuvres en Picardie 10 septembre 1910
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 5272

20. Clément Bayard : le Dupuy-de-Lôme 1912 et l’adjudant Vincennot 1913

Dupuy de Lôme, Issy-les-Moulineaux, 11 juillet 1912
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 9078

Le Dupuy-de-Lôme ou Clément-Bayard N°3 est un géant de 89 mètres de long destiné à l’armée française. La nacelle dispose d’un immense empennage arrière, caractéristique de la marque. L’Adjudant Vincennot ou Clément-Bayard N°4 est un dirigeable de fabrication similaire, construit en 1911. Ce système dénommé cage à poule par les aérostiers s’avère assez peu efficace. L’Adjudant Vincennot est modifié en 1913 : sa nacelle est réduite avec suppression de l’empennage arrière, remplacé par un grand gouvernail. Le Clément-Bayard N°5 est livré à la Russie et le dernier dirigeable construit par la firme est le Montgolfier. En 1914, lors du déclenchement des hostilités, trois des six dirigeables de l’armée française étaient des Clément-Bayard. Ils sont utilisés essentiellement pour des missions de reconnaissance et ponctuellement pour des bombardements. Néanmoins, l’armée française cesse leur l’utilisation en 1917, contrairement à l’armée Allemande qui utilise des dirigeables rigides réalisés notamment par la firme Zeppelin. L’Allemagne compte douze dirigeables militaires et autant de dirigeables civils à l’entrée en guerre. La firme Zeppelin construit 80 dirigeables durant la guerre, l’armée en perd 60, dont la moitié par accident. 

Dupuy de Lôme, Issy-les-Moulineaux
12 juillet 1912
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 9072
Adjudent Vincennot modifié, Issy-les-Moulineaux
22 août 1908
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MC 11241

21. La Société Zodiac : le Comte-de-la-Vaulx

La Société Zodiac est le nom donné, à partir de 1911, à la Société française des Ballons et dirigeables créée en 1908 par Maurice Mallet et le Comte Henri de la Vaulx. Maurice Mallet est un artiste peintre passionné de sport aéronautique qui fonde sa propre société de construction de ballons en 1896 dans le Bois de Boulogne. Membre de l’Aéroclub de France, c’est un acteur connu de la profession. Zodiac amorça également une activité dans l’aviation entre 1911 et 1913, avant de se recentrer à la demande de l’armée sur les dirigeables.

Si les premiers établissements Maurice Mallet étaient situés dans les Hauts-de-Seine, à Boulogne et Puteaux, c’est le site de Saint-Cyr-l’École dans le futur Département des Yvelines et son aéroport qui servent au développement de la firme. Le Comte-de-la-Vaulx, premier aérostat construit par la firme en 1906 est de petite taille. La société vise la clientèle des particuliers pour le sport et des entreprises comme support de réclame au travers du concept d’autoballon. Les ballons et dirigeables Zodiac connaissent un grand succès grâce aux facilités de démontage et montage qui les caractérisent. La société exporte dans de nombreux
pays comme la Russie, les Pays-Bas, le Japon, le Etats-Unis, le Canada, etc.

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Dirigeable Zodiac Conte de la Vaulx au-dessus de la passerelle du Avre : Dirigeable Zodiac Conte de la Vaulx au-dessus de la passerelle du Avre © Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget

Dirigeable Zodiac Conte de la Vaulx dessus de la passerelle du Avre, près du parc de l’aéroclub, à Saint-Cloud
 

 

22. Albert Caquot et ses ballons d’observation : retour à Chalais-Meudon

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Attaque d’un ballon captif Albert Caquot par deux avions, près de Montdidier, lors de manoeuvres aériennes, 23 mai 1933
©Monde et Caméra / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget Inv. 2012/1/349
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Portrait d’Albert Caquot lors de la première guerre mondiale
©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 2144

Albert Caquot fut l’un des plus grands ingénieurs français du XXe siècle. 

Polytechnicien et ingénieur des Ponts et Chaussées, il naquit en 1881 dans une ferme des Ardennes. II choisit de s’associer à Armand Considère et son gendre Louis Pelnard en 1912 pour créer un bureau d’études. Ce grand inventeur a laissé de multiples inventions dans le génie civil, on retiendra le Christ rédempteur de Rio, le barrage de la Rance ou le Pont Georges V à Glasgow.

Savant, il fut membre de l’Académie des sciences où il entra en 1934 et qu’il présida en 1952. Mais ce fut aussi un passionné d’aéronautique dont les inventions furent déterminantes pour la victoire des alliés durant
la première et la Seconde Guerre mondiale. Familiarisé avec l’aéronautique dès son service militaire de 1901 à 1902, il fut mobilisé comme capitaine de la 21e compagnie d’aérostiers basée à Toul, en 1914. Il fit réaliser quelques observations avec le vieux ballon de Charles Renard qui datait de 1880. Il comprit que le manque de stabilité de l’aérostat rendait le témoignage des observateurs peu fiables. Il décida de concevoir un nouveau ballon dont il envoya les plans et calculs à l’atelier militaire de Chalais-Meudon en octobre 1914. Malgré la résistance du Chef d’établissement et de ses officiers, il obtint un essai grâce à l’appui du général Hirschauer, directeur de l’aviation et des moyens humains du bureau Considère.

L’atelier de Chalais Meudon fabriquait à l’époque, en série, une copie du ballon d’observation allemand, le Drachen. Les essais des trois aérostats se déroulèrent à Meudon, avec le ballon de Renard, le Drachen et le ballon d’observation d’Albert Caquot. Ils mirent en évidence la très grande supériorité de ce dernier. La résistance au vent du ballon Caquot était largement supérieure au Drachen et l’oscillation de l’axe du ballon au niveau du treuil beaucoup plus faible. L’invention d’Albert Caquot donnait ainsi un avantage stratégique à la France pour diriger les tirs d’artillerie avec précision.

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©D.R. / Coll. musée de l’Air et de l’Espace - Le Bourget MA 2144

23. Albert Caquot et ses ballons d’observation : retour à Chalais-Meudon

L’atelier de Meudon Chalais continue à fabriquer quelques temps des Drachen. L’Angleterre est représentée aux essais par un officier qui explique que l’armée britannique cherche un ballon d’observation embarqué. Albert Caquot, relève le défi et en génial inventeur conçoit le ballon M. Il doit toutefois retourner sur le front où il se fait remarquer par sa bravoure.

Il prend la direction de l’atelier mécanique de l’établissement de Meudon Chalais en juin 1915 et c’est là que sont fabriqués en série les ballons d’observation qu’il a conçus. Leur qualité incontestable en fait un avantage militaire certain et ils sont déployés dans toutes les armées alliées. 

L’essor international d’une invention tactique
46 ballons de type M sont livrés à l’Angleterre de juillet à novembre 2016. Albert Caquot s’y rend en décembre pour y diriger les essais des ballons d’observation montés sur des cuirassiers puis des torpilleurs. L’observateur situé dans une nacelle sous le ballon est relié par téléphone au vaisseau. Ils permettent à l’amirauté anglaise de déjouer les tirs des sous-marins ennemis et sauvent la vie de nombreux marins britanniques.

En 1917, Caquot est appelé à déployer le même dispositif pour la marine française. Les compagnies aérostières se développent jusqu’au nombre de 75, en 1916. La portée historique des ballons Caquot est considérable. Leur très bonne qualité technique permet de réaliser des observations très fiables qui nourrissent avec précision les tirs d’artillerie sur terre et en mer. Ils donnent un avantage tactique considérable aux forces alliées.

Ils sont utilisés également lors de la Seconde Guerre mondiale jusqu’en 1942. En outre, les ballons de type Caquot sont produits par milliers pour faire des barrages de différents types afin de protéger les villes anglaises et le palais de Buckingham des bombardements allemands au début de la Seconde Guerre mondiale. Les avions ennemis se prennent dans les câbles rattachant le ballon au sol.

Cette exposition a été réalisée sous la direction d’Elise de Blanzy-Longuet, Directrice de la Culture et d’Eva Grangier Menu, adjointe de la Directrice à la
Culture du département des Hauts-de-Seine, et sous la direction scientifique de Pierre Chancerel, Directeur des Archives départementales des Hauts-de-
Seine, en partenariat avec l’Association pour un Centre Européen des Dirigeables, A.C.E.B.D.

Conception et textes
Elizabeth Juguet, ingénieur principal, Direction de la Culture.
Remerciements
• Le musée de l’Air et de l’Espace Aéroport de
Paris-Le Bourget et son centre de documentation
• La ville de Meudon
• Les Archives municipales de Boulogne
• Les Archives municipales de Neuilly
• Le musée de la carte à jouer de la ville
d’Issy-les-Moulineaux
• Les différents services de la Direction de la Culture
et de la Direction de la Communication
• La Direction des Parcs, Promenades et
de l’Environnement et le centre technique
départemental.
Bibliographie
Cette exposition n’aurait pu être montée sans les ouvrages suivants et en particulier ceux de Stéphane Nicolaou.
Stéphane Nicolaou, Santos-Dumont, dandy et génie de l’aéronautique, collection « Envols » n°4, E.T.A.I.et Musée de l’Air et de l’Espace-Le Bourget, 1997.

Stéphane Nicolaou, Les premiers dirigeables français, collection « Envols » n°3, E.T.A.I.et Musée de l’Air et de l’Espace-Le Bourget, 1997.

Comité éditorial Maurice Bazin, Jean Carpentier, Bruno Chanetz, Marie-Claire Coët, Khoa Dang-Tran, Jean Délery, Nicole Landré, Jean-Pierre Marec, De l’aérostation à l’aérospatial, le centre de recherche de
l’ONERA à Meudon, conception Mathilde Elie Alsace Media Science.,ONERA, 2007.

João Luiz Musa, Marcelo Breda Mourão, Ricardo Tilkian, Alberto Santos-Dumont : I sailed the wind, From mastering the steering of balloons to the conquest of heavier-than-air flight. Editora nova Frontera, Ministério Da Cultura, Brazil, 2003.

Jean Molveau et Francis Bedei, Vaisseaux aériens, l’épopée des ballons dirigeables de 1850 à nos jours, Marines Editions, 2011.

Eugène Perreau, Dirigeables et aéroplanes, les Cahiers du Centre, 1912. 

Alphonse Berget, Ballons, dirigeables et aéroplanes, Librairie Universelle, 1908.

Michel Vaissier, L’épopée des grands dirigeables et du Dixmud, édition Mens Sana, 2011.

Jean et Thierry Kerisel, Albert Caquot 1881-1976 Savant, soldat et bâtisseur, Presses De L’Ecole Nationale Des Ponts Et Chaussées, 2001.Version en ligne : Fond Open Source - Bulletin de la Sabix-Société des amis de la bibliothèque et de l’histoire de de l’Ecole de Polytechnique.

Le Catalogue technique et commercial de la Société de construction aéronautique « Astra » ancien établissement Surcouf, 1911. Les articles scientifiques publiés sur les sites internet du CNRS dont Ballons dirigeables autonomes de Simon Lacroix LAAS/CNRS.