Au JAD, artisans et designers prennent possession des lieux

5 min de lecture

Tourisme et loisirs Culture Centre culturel Exposition

-

5 min de lecture

Tourisme et loisirs Culture Centre culturel Exposition
Le président du Département Georges Siffredi, aux côtés (de gauche à droite) de la designeuse textile Rose Ekwé, du designeur-sculpteur Cédric Breisacher, du designer Baptiste Meyniel, du tourneur sur bois Maxime Perrole, du designer Martin Blanchard et de l'ébéniste Albane Salmon.CD92 / Julia Brechler
À l’occasion de la douzième édition de la Paris Design Week, le président du Département, Georges Siffredi, a inauguré le Jardin des Métiers d’Art et du Design, dernier-né des équipements culturels du Département.

Impressionnée par la foule, elle s’approche à petits pas, se frayant un chemin jusqu’à un présentoir exposant dans un vaste showroom deux de ses créations, une selle et un bridon d’équitation. « Voici Sophia, qui est une excellente représentante de cette joyeuse communauté qui nous a rejoint », s’enthousiasme auprès du président Georges Siffredi, Grégoire Talon, directeur du Jardin des Métiers d’Art et du Design, à l’occasion de l’inauguration officielle de cet équipement unique en son genre, pensé pour cultiver le dialogue et l’émulation entre artisans d’art et designers.

Sellière garnisseuse-harnacheuse, Sophia Zakabloukowa fait partie des onze premiers résidents sélectionnés pour faire vivre cet écrin d’excellence, situé à proximité de la Cité de la Céramique de Sèvres. Tous ont pu proposer au regard des visiteurs de la spectaculaire galerie un échantillon de leur travail, où se tient jusqu’au 4 décembre l’exposition inaugurale, intitulée Matières à pensées.

« Mon installation dans les locaux s’est parfaitement passée. Après tout, je n’avais qu’une machine à coudre à déménager, ironise la jeune sellière, déjà détentrice du label départemental Artisan du tourisme. Le caractère hybride du JAD m’a véritablement séduite. C’est bien plus qu’une pépinière d’entreprises ou un simple lieu de résidences. C’est un projet sans équivalent, qui s’empare d’un bâtiment historique. Il est d’ailleurs assez émouvant de redonner vie à ces anciens ateliers, où l’on sent encore la présence des artisans qui y ont travaillé ».

Anciens ateliers, deuxième vie

Passionnée par le travail du cuir, Sophia Zakabloukowa propose des créations sur-mesure pour les cavaliers, mais pas seulement. « Je suis amenée à travailler sur des selles de moto, pour l’ameublement, la confection d’accessoires…, explique la jeune femme, très émue lorsque qu’elle a appris sa sélection au sein du JAD. J’en ai pleuré de joie ! Ces deux dernières années ont été assez compliquées pour moi, avec la crise sanitaire. Je m’étais un peu perdue, je ne créais pratiquement plus. Cette résidence va me permettre de relancer tous les projets que j’avais mis de côté ».

Lieu d’inspiration pluridisciplinaire, le Jardin des Métiers d’Art et du Design offre à ses occupants l’opportunité de concrétiser leurs ambitions et d’explorer de nouveaux territoires d’expression. « Intégrer le JAD, c’est intégrer tout un écosystème, un environnement dont j’avais besoin, explique Baptiste Meyniel, designer. J’apprécie aussi de pouvoir travailler dans un atelier de grande dimension, proche de chez moi, qui me permet d’envisager des créations d’une autre envergure ».

Installé depuis seulement quelques jours, l'artisan perfectionne encore l’aménagement de son atelier. À côté de son ordinateur, qui affiche une modélisation informatique en 3D de son futur espace de travail, trône une lampe au fonctionnement astucieux et au design élégant. Elle a su convaincre le Mobilier national, qui en a fait l’acquisition lors d’un appel à projet. Enseignant à l’ENSAAMA, École nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d'art, Baptiste Meyniel fait partie des artisans au travail déjà reconnu, au même titre que Cédric Breisacher, designer-sculpteur, dont une de ses chaises en bois exposée dans la grande galerie occupe aujourd’hui une place au Palais de l’Élysée.

Promouvoir les savoir-faire

« Le JAD témoigne de la volonté de notre Département de soutenir l’ancrage et le développement de ces métiers qui demandent des savoir-faire pointus et des compétences parfois devenues rares, explique Georges Siffredi. Avec cette réhabilitation, pour laquelle nous avons consacré un investissement de 13 millions d’euros, le Département s’inscrit dans une logique de continuité et de transmission ».

Une transmission qui passera par la multiplication des actions de valorisation des métiers d’art et du design auprès des scolaires ou des publics les plus éloignés de la culture. « Le volet éducatif du JAD est crucial à mes yeux, souligne Carole Calvez, designeuse olfactive. Il permet de mettre en lumière mon métier, qui nécessite une véritable initiation. J’y participe d’ailleurs grâce à une association, qui travaille sur l’éveil olfactif dès la crèche ».

Créatrice de parfums, Carole Calvez s’est spécialisée dans la conception de scénographies augmentées, ajoutant une dimension olfactive à des expositions de peinture ou de sculpture. Ancré dans la perspective du nouveau Bauhaus européen, initiative de la Commission européenne visant à penser la ville de demain, le JAD a vocation à encourager toutes les innovations. L’ensemble des résidents a ainsi incorporé à son travail une réflexion sociale et écologique. « J’ai imaginé, en collaboration avec un laboratoire de Mulhouse, le Gélotextile, raconte Rose Ekwé, designeuse textile éveillée aux problématiques modernes du prêt-à-porter. Il s’agit d’un tissu utilisant un fil à la composition innovante et à la texture gelifiante. Il possède des propriétés hydratantes, hypoallergéniques et même cicatrisantes ».

Matière bio-sourcée, le Gélotextile est intégralement compostable et laisse imaginer diverses débouchées industrielles. « J’espère pouvoir ouvrir ma pratique à d’autres usages, grâce aux autres artisans et au parc de machines du Makerlab. On peut en effet tisser toutes sortes de choses : du bois, du métal, et même de la pierre ! ».