Comment répondre aux enjeux du grand âge ?

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Solidarité

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Solidarité
L'enjeu du grand âge et de la perte d’autonomie a été posé avec ses défis en terme de finances publiques, de décloisonnement des services, d’articulation des différents acteurs et de revalorisation des métiers du soin. CD92/WILLY LABRE
Le 26 janvier, le Département a accueilli les Entretiens Albert-Kahn « Grand âge » pour réfléchir à une nouvelle politique publique de l’autonomie.

« Avec 333 M€ [pour l’autonomie], c’est plus d’un tiers de son budget dédié aux solidarités que les Hauts-de-Seine consacrent à nos aînés et aux personnes en situation de handicap afin de leur assurer les meilleures conditions de vie », indique en introduction le président Georges Siffredi. Pour faire face aux besoins nouveaux d’une population vieillissante, il expose les trois piliers de la politique départementale : « la diversification de l’offre d’accueil en établissement, le maintien à domicile et par-dessus tout, (…) : la qualité de vie. » L’innovation est au cœur de l’action du Département avec notamment le nouveau référentiel « Ehpad de demain », le développement de l’accueil temporaire et de l’accueil séquentiel, des maisons de répits pour les aidants, de l’habitat inclusif, l’adaptation de logements à la perte d’autonomie (Ma Prime’Adapt) ou l’ouverture de l’agence interdépartementale AutonomY.

Première intervenante, Anne Smetana, attachée santé à l’ambassade du Danemark à Paris, a présenté les différentes réformes de son pays, en 2007, 2021 et 2025, basées sur une politique de maintien à domicile couplée à une détection précoce des fragilités. Toutes les personnes de plus 80 ans se voient ainsi offrir une visite à domicile holistique où tous les critères - santé, besoins, adaptation du logement, relations sociales… - sont passés en revue. « La réforme en cours se base sur la débureaucratisation, la dignité de la personne âgée et son bien-être », résume-t-elle.

Prévenir la perte d’autonomie

À sa suite, Pierre-Yves Cusset, chargé de mission au Centre d’analyse stratégique, a présenté les niveaux de dépenses et de contributions sociales par personne en 2019 et en 2030. Il apparaît certes que les dépenses augmentent et les contributions diminuent en fonction du taux de vieillissement, mais que des adaptations ont déjà été trouvées (CSG, part de TVA affectée à la protection sociale), qu’il faut poursuivre.

Le professeur en gériatrie Claude Jeandel propose une approche, non pas basée sur l’âge, mais sur l’autonomie, dans le sens des « capacités à assurer les actes de la vie quotidienne ». Pour lui, l’âge n’est pas un critère pertinent, c’est un simple facteur aggravant, au même titre que le tabac ou la sédentarité. Il détermine trois profils de personnes âgées : « robustes », « en fragilisation », « en perte d’autonomie ». Les études montrent que deux types de facteurs – environnementaux (alimentation, activités physiques, vie en couple…) et génétiques - conditionnent un successful aging (vieillissement en bonne santé). Une double action pourrait ainsi faire reculer la perte d’autonomie : faire de la prévention santé dès 50 ans, identifier les personnes en voie de fragilisation afin de les prendre en charge et éviter – ou faire reculer - la case « dépendance ».

Des facteurs de risques connus

Il partage une dernière observation : les affections neuro-évolutives (Alzheimer, démences, etc.) sont deux à trois fois plus présentes chez les personnes touchées par la précarité, l’hypertension, le tabagisme, le diabète…, soit les mêmes facteurs de risques que pour les maladies cardio-vasculaires. Des AVC et des infarctus qu’on a justement pu faire reculer -  en moyenne de quinze ans - grâce à la prévention. Alors, « pourquoi autant de réticences pour mettre en place une politique de prévention ? », interroge Alice Le Moal, conseillère départementale déléguée à l’ASE. Le “renflouement” de la PMI, de la médecine scolaire, de la médecine du travail ou l’articulation avec la médecine libérale sont notamment évoqués pour prendre leur part à une politique de prévention. Le soutien aux aidants, futurs « fragilisés » en puissance, et la nécessité d’Ehpad ou d’hôpitaux qui soient des lieux de vie ET de soins sont également débattus.

Puis, Anne-Marie Ho-Dinh, conseillère technique à la CNSA, Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, a relaté la création en 2020 de la cinquième branche de la Sécurité sociale, la coopération avec les Départements, le chantier de la simplification des financements, et son budget : 27 milliards d’euros aujourd’hui, 39 milliards en 2024.

Olivier Richefou, président du Département de la Mayenne, membre du conseil d’administration de la CNSA, a complété en évoquant les immenses besoins pour rénover les Ehpad, intégrer les nouvelles technologies, faire converger les politiques « grand âge » et « handicap », mais aussi le grand enjeu de demain : prévenir la maltraitance par manque de moyens dans le cadre du maintien à domicile. Pour Armelle Tilly, vice-présidente chargée des solidarités, « l’enjeu 2030 est de bien comprendre les attentes et les besoins des usagers et se donner les moyens du virage domiciliaire. »

Alexandra Fourcade, médecin de santé publique et conseillère départementale déléguée aux personnes âgées, a conclu en pointant la nécessité d’intégrer soin et autonomie, de créer des outils d’évaluation précoces en lien avec les services infirmiers (SSIAD), d’accompagnement (SAAD) et les médecins généralistes, et de développer une culture de l’évaluation, non pas pour « culpabiliser les professionnels de santé, mais pour améliorer le service. »

 

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